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Mahâbhârata
Le Guide du Pélerin
Mahâbhârata, Livre I, III, IX
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Livre I 205-210 : Pèlerinage d'Arjuna.
Arjuna pénètre dans la chambre où Yudhishthira se trouve avec Draupadî. D'aprés le pacte qu'ils ont conclu, il doit partir en exil : il en profite pour visiter les lieux saints, et rencontrer plus que bibliquement une princesse des serpents et la fille du roi Citravahâna, qui lui donneront toutes deux un fils. Il sauve aussi cinq nymphes transformées en crocodiles, et voici pourquoi :
(Arjuna dit :)
Qui es-tu, ma belle ? Pourquoi vis-tu dans l'eau ? Est-ce à cause d'une grande faute que tu aurais commise ?
Vargâ dit :
Ô guerrier, tu es grand et fort ! Je suis la nymphe Vargâ, habituée des jardins célestes et aimée de Dhanapati (Kubera).
J'ai quatre amies, toutes quatre belles et aimantes. Avec elles, je suis partie pour le palais de Kubera, gardien du monde.
Alors, toutes cinq, nous vîmes un beau brâhmane, fidèle à ses voeux, qui étudiait, seul, en un lieu retiré.
Il emplissait la forêt de l'éclat de son ascèse et, comme le soleil, il illuminait toute la région.
À la vue de sa beauté et de la force de son ascèse, nous descendîmes dans cet endroit avec le désir de mettre fin à ses austérités.
Saurabheyî, Samîcî, Budbudhâ, Latâ et moi-même, nous nous approchâmes ensemble de ce brâhmane, ô Bhârata.
Nous chantions, nous riions, et lui faisions du charme. Mais il ne faisait aucun cas de nous et majestueusement, sans broncher, il continuait son ascèse.
Le brâhmane en colère nous maudit, ô puissant guerrier : "Transformées en crocodiles, vous vivrez dans l'eau, pendant cent années."
Vargâ dit
Alors nous toutes, tremblantes, implorâmes cet inébranlable ascète, ô meilleur des Bhârata.
Orgueilleuses de notre beauté, de notre jeunesse et de notre amour, nous avons mal agi. Daigne être indulgent envers nous, ô brâhmane.
Tu nous tues ! Nous n'avions fait que venir ici pour te séduire, mais tu es resté imperturbable.
Les hommes justes pensent que les femmes n'ont pas été créées pour être tuées. C'est pourquoi, en toute justice, daigne ne pas nous détruire.
On dit que le brâhmane est l'ami de toutes les créatures. Que cette parole des sages devienne réalité, ô noble brâhmane !
Les hommes instruits protègent ceux qui viennent chercher refuge. Nous cherchons refuge auprès de toi, daigne donc nous pardonner.
Vaishampâyana dit :
À ces mots, ce juste brâhmane aux actes purs, brillant comme le soleil et la lune, leur accorda une faveur, ô roi.
Le brâhmane dit :
Cent ans, mille ans, toujours, tout cela signifie l'éternité. Mais ici, cent ans est une mesure réelle et ne veut pas dire l'éternité.
Devenues crocodiles, vous tirerez des hommes sous l'eau, et quand un homme supérieur vous jettera sur la rive,
Alors, vous retrouverez toutes votre beauté d'avant. Et je n'ai jamais menti, même par plaisanterie !
À partir de ce moment là, les lieux où vous aurez habité seront appelés "lieux saints des femmes". Ils seront purs et sanctifieront les hommes sages.
Livre III 80-153. Pèlerinage de Yudhishthira.
Arjuna étant parti pour acquérir des armes divines auprès d'Indra, le roi des dieux, ses frères et leur épouse s'ennuient et s'inquiètent, quand survient un de ces sages itinérants, Nârada, qui les invite à effectuer un pèlerinage en attendant le retour d'Arjuna. Nous assistons à une vaste pérégrination, à un tour de l'Inde dans le sens de la course du soleil, et c'est l'occasion de raconter l'histoire des lieux saints et ce qui les a rendus tels.
Voici la très célèbre histoire de la Descente du Gange :
Lomasha dit :
Ce roi (Bhagîratha), grand archer, grand guerrier, devint empereur de toute la terre. Il réjouissait les yeux et le coeur.
Il apprit que ses ancêtres avaient été cruellement détruits par le noble Kapila et qu'ils n'avaient pu obtenir le ciel d'Indra.
Le roi, le coeur affligé, confia le royaume à son ministre et se dirigea vers les flancs de l'Himavant (Himâlaya) pour y pratiquer l'ascèse.
Il désirait se concilier Gangâ (le Gange) en brûlant ses péchés par l'ascèse, ô meilleur des hommes. Il contempla l'Himavant, cette immense montagne.
Elle était ornée de pics de différentes formes et de différentes matières, entourée de tous côtés de nuages apportés par le vent.
Elle était parée de rivières, de forêts, de vallées où roulaient des torrents, habitée par des lions et des tigres qui se tapissaient dans ses grottes et ses ravins,
Et par de grands oiseaux au plumage bariolé poussant leurs cris variés, des huppes, des oies, des foulques, des poules d'eau,
Des paons, des piverts, des coucous, des faisans, des perdrix à l'oeil souligné de noir attentives à leurs petits.
Elle abondait d'étangs ravissants couverts de lotus et de hérons au chant mélodieux.
Sur ses terrasses se reposaient les génies et les nymphes. Un peu partout, ses arbres étaient lacérés par les défenses des éléphants sauvages.
Des génies magiciens la parcouraient, et des serpents venimeux à la langue frétillante. Elle regorgeait de pierres précieuses.
Il atteignit l'Himavant, tantôt doré, tantôt argenté, tantôt masse noirâtre.
Et là, cet excellent homme s'adonna à une ascèse terrible, ne se nourrissant que Et cette fantastique période de mille années s'étant écoulée, la grande rivière Gangâ lui apparut en personne sous forme humaine.
Gangâ dit :
Que désires-tu, ô grand roi ? Que dois-je te donner ? Dis-le moi, ô meilleur des hommes, je le ferai.
Lomasha dit :
À ces mots, le roi répondit à la fille de l'Himavant :
(Bhagîratha dit :)
Mes ancêtres, ô rivière dispensatrice de dons, cherchaient le cheval du sacrifice. Kapila les détruisit et les envoya au royaume de Yama.
Les soixante mille nobles fils de Sagara ont été anéantis en un instant par Kapila, grâce à ses pouvoirs.
Tant que tu ne baigneras pas leurs corps privés de vie, ils ne trouveront pas de séjour dans le ciel.
Conduis au ciel les fils de Sagara, mes ancêtres, ô illustre rivière. Je t'implore pour eux, ô grande rivière.
(Lomasha dit)
À cette prière du roi, Gangâ (le Gange), vénérée dans les trois mondes, répondit toute joyeuse à Bhagîratha :
(Gangâ dit :)
Je ferai ce que tu demandes, ô grand roi, n'en doute pas. Mais lors de ma chute, sous mes flots tombant du ciel, nul ne résisterait !
Personne dans les trois mondes n'y pourrait résister, ô roi, si ce n'est le meilleur des dieux, Maheshvara (Shiva) à la gorge bleue.
Rends-toi favorable Hara (Shiva), le dispensateur de bienfaits, par ton ascèse, et ce dieu, lors de ma chute, me recevra sur sa tête. Il te fera cette faveur pour venir en aide à tes ancêtres.
(Lomasha dit :)
À ces mots, le grand roi Bhagîratha se rendit au mont Kailâsa pour acquérir les faveurs de Shamkara (Shiva),
Et, après un certain temps, cet excellent roi rencontra Shiva qui accepta de recevoir Gangâ sur sa tête pour permettre à ses ancêtres de séjourner au ciel.
Lomasha dit :
Ayant entendu la prière de Bhagîratha, et pour plaire aux dieux, le seigneur Shiva dit au roi :
(Shiva dit :)
Qu'il en soit ainsi !
Ô puissant et excellent roi, je supporterai, pour te faire plaisir, la pure, la divine, l'auspicieuse rivière céleste lors de sa chute.
(Lomasha dit)
Là-dessus, entouré de ses farouches serviteurs brandissant toutes sortes d'armes, le dieu se rendit à l'Himavant, ô puissant Yudhisshthira,
Et s'arrêtant là, dit à l'excellent Bhagîratha :
(Shiva dit :)
Ô grand roi, demande à la fille du roi des montagnes de venir. Je recevrai cette excellente rivière quand elle tombera du ciel d'Indra.
(Lomasha dit :)
À ces mots prononcés par Sharva (Shiva), le roi, s'étant pieusement préparé, s'inclina et invoqua Gangâ.
Alors la rivière aux eaux pures et merveilleuses, invoquée par le roi, vit qu'Ishana (Shiva) se tenait là et coula soudain du ciel.
Curieux de la voir tomber, les dieux, les Grands Anciens, les génies, les serpents et les ogres accoururent.
Et Gangâ, la fille de l'Himavant, tomba du ciel, agitée de violents remous, entraînant poissons et crocodiles.
Hara (Shiva) reçut sur son front, comme une couronne de perles, Gangâ l'écharpe du firmament, qui tombait du ciel.
Elle se divisa en trois en se répandant vers l'océan, dans des nuages d'écume qui ressemblaient à des vols de cygnes.
Tantôt elle se courbait et se recourbait, tantôt elle hésitait, tantôt elle se drapait d'écume, tantôt elle coulait comme ivre de joie, tantôt elle grondait du rugissement de ses eaux sonores.
Ainsi, elle prit de nombreux aspects en tombant du ciel. Arrivée à la surface de la terre, elle dit à Bhagîratha :
(Gangâ dit :)
Montre-moi le chemin que je dois suivre, ô grand roi. C'est pour toi que je suis descendue sur terre.
(Lomasha dit :)
À ces mots, ô meilleur des hommes, le roi Bhagîratha partit là où se trouvaient les corps des nobles fils de Sagara, pour leur procurer le salut par cette eau pure.
Après avoir supporté la chute de Gangâ, Hara (Shiva) partit avec les Trente pour le sublime mont Kailâsa.
Accompagné de Gangâ, le roi atteignit l'océan, séjour de Varuna, et le lui fit remplir de ses flots.
Il adopta Gangâ pour fille et il donna l'eau à ses ancêtres. Ses désirs étaient comblés.
Arjuna rejoint ses frères sur le mont Gandhamâdana.
Livre IX- 34-53. Pèlerinage de Balarâma le long de la Sarasvatî.
Râma, le frère de Krishna, refuse de prendre part à la bataille imminente et entreprend un pélerinage le long de la rivière Sarasvatî et vers l'Himâlaya. C'est l'occasion de décrire différents lieux saints avec leur origine et leurs mérites, et de raconter maintes histoires d'ermites et de dieux.
Donnons une idée de l'organisation d'un tel pélerinage:
Sur le point de partir, Râma; avait dit à ses serviteurs: "Allez chercher à Dvârakâ le matériel et tous les ustensiles nécessaires au pèlerinage, ainsi que les feux et les prêtre sacrifiants,
"Et de l'or et de l'argent, des vaches et des veaux, des chevaux, des éléphants, des chars, des mules et des chameaux, des chariots. Que tout ce matériel soit amené rapidement en vue du pèlerinage.
Puis remontez en vous hâtant le cours de la Sarasvatî en rassemblant par centaines les prêtres et les nobles brâhmanes.
Après avoir donné ces instructions à ses serviteurs, le puissant Baladeva (Râma) était parti en pèlerinage, ô valeureux Bhârata, tandis que se déroulait le massacre des Kuru,
Avec ses prêtres, ses amis et d'excellents brâhmanes, ses chars, ses éléphants, ses chevaux et ses nombreux véhicules attelés de beufs, de mules et de chameaux.
Ces véhicules étaient attendus en tous lieux par des enfants et des vieillards décharnés, affamés, épuisés, à cause de la nourriture que l'on mettait à leur disposition de toutes parts.
Ainsi, quand un brâhmane éprouvait l'envie de manger, on lui offrait de la nourriture.
Sur l'ordre de Rauhineya (Râma), des hommes étaient disposés de toutes parts pour préparer une multitude de nourritures et de boissons,
Et des vêtements précieux. Des lits et des couvertures étaient disposés en l'honneur des prêtres soucieux de leur bien-être.
Chaque fois qu'un brâhmane voulait dormir, ou bien même un guerrier, tout était mis à sa disposition, ô Bhârata (Janamejaya).
Les gens restaient ou s'en allaient, à leur gré. Il y avait des véhicules pour ceux qui désiraient être transportés, des boissons pour ceux qui avaient soif,
Et de la nourriture pour ceux qui avaient faim. Des serviteurs offraient des vêtements et des parures, ô puissant Bhârata.
La route, ô noble roi, était agréable en tout point, comme un paradis, pour ceux qui voyageaient.
Elle fourmillait de gens heureux, elle offrait de la nourriture délicieuse. Elle était belle, couverte de centaines de gens de toutes sortes, et de centaines d'éventaires et de boutiques, avec leurs marchandises. Elle était ombragée d'arbres et de lianes, et semée de pierres précieuses.
Le héros des Yadu (Râma), à la charrue pour emblème,
Magnanime et ferme dans ses voeux
Donnait beaucoup dans les lieux saints:
Aux brâhmanes, pour honoraires des sacrifices,
Des vaches laitières et des génisses par milliers,
Parées de riches étoffes, les cornes serties d'or,
Et des chevaux venant de différentes contrées,
Des véhicules et des servantes. Tout cela aux brâhmanes.
Râma donnait aux chefs des brâhmanes
Des bijoux, des perles, des gemmes et du corail,
De l'or très fin et de l'argent très pur
Et des ustensiles en fer et en cuivre.
Le noble Râma ainsi a distribué des richesses
En abondance dans les lieux saints de la Sarasvatî.
De là, progressivement, rayonnant de splendeur,
Et de majesté, il s'en vint au Kurukshetra.
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