Mahâbhârata
Skanda
Livres III, 213 à 221, IX, 43 à 45, XIII, 83 à 86
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Skanda est un jeune dieu guerrier qui surgit, avec pour auteurs de ses jours plusieurs pères et plusieurs mères. Sa puissance divine est terrifiante et l'emploi de cette force est urgente : les dieux perdent face aux démons au cours d'une de leurs luttes éternelles contre eux.
Le livre III met surtout l'accent sur la naissance de Skanda. A deux autres reprises, le Mâbhârata revient sur Skanda : au chant IX, pour nous raconter son origine et son investiture aux fonctions de chef de l'armée des dieux (il doit affronter les démons) et au chant XIII, pour nous dire pourquoi l'or est né de Skanda et doit être offert dans les sacrifices
Livre III, 213-221 : La Descendance du Feu
Agni, le dieu du feu, est amoureux des épouses des sept Grands Anciens. Svâhâ, par ailleurs, est amoureuse d'Agni. Elle prend alors successivement l'apparence de six d'entre elles, approche Agni et fait l'amour avec lui, et recueille par six fois sa semence qu'elle dépose dans une urne d'or sur la montagne Shveta. Ainsi naît Skanda, immédiatement redoutable
Et cette semence, déposée là, se rassembla par sa propre énergie et engendra un fils, honoré par les brâhmanes. Cette semence déposée mit au jour Skanda.
Kumâra (Skanda) naquit avec six têtes, deux fois plus d'oreilles, douze yeux, douze bras et douze pieds, mais un seul cou et un seul tronc.
Guha (Skanda) prit forme le deuxième jour, le troisième, c'était un jeune enfant, le quatrième il développa ses membres principaux et secondaires.
Il était caché par un nuage rouge chargé d'éclairs. Et au sein de ce grand nuage, il brillait comme le soleil à son lever,
Et tenait à la main le grand arc qui abat les ennemis et même les dieux et que Shiva avait déposé près de lui.
Empoignant cet arc admirable, il rugissait avec force, faisant trembler les trois mondes et tout ce qu'ils contenaient.
Au bruit de ce rugissement, qui résonnait comme une multitude de gros nuages d'orage, les deux grands éléphants Citra et Airâvata s'envolèrent.
Le fils d'Agni, brillant comme le soleil à son lever, les vit tomber et les saisit de ses deux mains. D'une autre main, il saisit une lance,
Et d'un autre bras encore, il enserra un énorme coq d'une vigueur extrême. Cela fait, il rugit de façon terrible, pour s'amuser.
Saisissant une grande conque de deux mains, il souffla dedans, effrayant tous les êtres, même les plus forts.
Il frappa maintes fois l'espace de ses deux bras. Mahâsena (Skanda), en jouant, absorbait les trois mondes dans ses bouches et resplendissait sur le sommet de la montagne. Inégalable, il rayonnait comme le soleil à son lever.
Assis, tel un géant, au sommet de cette montagne, d'un courage prodigieux, il regardait, ses têtes tournées dans toutes les directions. En apercevant les différentes formes de vie, il rugit de nouveau.
A ce rugissement, les gens se précipitèrent dans toutes les sens et terrorisés, l'esprit en déroute, cherchèrent refuge auprès de lui.
Et de ces gens de toutes races qui se réfugièrent auprès de lui, les brâhmanes disent qu'ils sont la suite invincible de ce dieu.
30. Ce dieu guerrier se leva, rassura les gens, banda son arc et décocha ses flèches sur la montagne Shveta.
Il fendit de ses flèches le mont Krauñca, fils d'Himavant. Par cette brèche, les vautours et les oies gagnent le mont Meru.
La montagne brisée tomba en poussant un cri terrible et désolé. Et cette chute fit hurler de terreur les autres montagnes.
Devant le cri des montagnes effrayées, ce dieu d'une force incomparable ne trembla pas. Il leva son épée et rugit de toutes ses forces.
Et d'un coup de cette immense épée, brisa le sommet redoutable de la montagne Shveta.
Alors la malheureuse montagne Shveta avec ses compagnes s'envola, quittant la terre par peur de lui.
Et la Terre, ébranlée, se fendit de tous côtés. Blessée, elle chercha refuge auprès de Skanda, et retrouva sa force.
Les montagnes lui rendirent hommage et revinrent sur terre. Depuis lors, le monde adore Skanda au cinquième jour de la lune croissante.
Skanda sera ensuite adopté par les Krittikâ.
Livre IX, 43-45. L'Investiture de Skanda.
Le Livre IX nos présente une autre version de la naissance de Skanda
Autrefois, de la semence émise par Maheshvara (Shiva) tomba dans le feu, et Agni, qui dévore tout, ne put la brûler, car elle était indestructible.
Le lumineux porteur d'offrandes (Agni) en fut illuminé et fortifié. Mais il ne put porter cette semence faite d'énergie.
Le maître du sacerdoce (Agni) s'approcha alors de Gangâ (le Gange) et y déposa cette semence divine, lumineuse comme le soleil.
Et Gangâ, à son tour, ne pouvant porter cette semence, la déposa sur la belle montagne Himavant, louée des immortels.
10. Et là, le fils du feu grandit, tournant le dos aux mondes. Les Krittikâ virent alors ce nouveau-né à l'aspect flamboyant,
Ce glorieux fils du dieu du feu, dans une forêt de bambous. Et elles s'approchèrent toutes, le voulant pour fils, en disant : "Il est à moi !"
Il comprit leur envie d'être mères, et but leur lait de ses six bouches.
Les Krittikâ, ces déesses au corps divin, furent remplies d'étonnement à la vue de la force de cet enfant.
Sur le sommet de la montagne, là où l'avait déposé Gangâ, tous les rochers devinrent d'or.
La terre exultait de cet enfant grandissant, et alors toutes les montagnes se transformaient en or.
Arjuna rejoint ses frères sur le mont Gandhamâdana.
Livre XIII, 83 à 86. La Naissance de l'Or.
Nous avons encore au livre XIII une version différente de la naissance de Skanda
Les dieux dirent :
48.Il y a un démon, du nom de Târaka, rendu orgueilleux par un don de Brahmâ. Il nous tourmente de sa force. Il faut qu'il meure.
Sauve les dieux, ô Pâvaka (Agni), et les maîtres des créatures, et les Anciens aux grands mérites.
Engendre un fils héroïque et vigoureux, qui nous délivre de la peur de ce démon, ô seigneur Havyavâhana (Agni).
Maudits par la grande déesse Umâ, nous n'avons pas d'autre refuge que ta vigueur. Sauve-nous !
A ces mots, l'invincible seigneur Agni, le mangeur d'offrandes et d'oblations, acquiesça et se rendit auprès de Bhâg∞rath∞ (Gangâ).
Il s'unit à elle et engendra un enfant, qui grandit en elle comme un feu de broussaille.
Gangâ éprouva de violentes souffrances causées par son ardeur, et l'esprit troublé, ne put les supporter.
Pendant que le feu déposait en Gangâ sa semence ardente, un démon poussa un cri effrayant.
Et Gangâ, ne sachant d'où venait ce grand bruit, s'effraya, et, les yeux égarés, le regard noyé, perdit conscience, incapable de porter l'enfant en elle.
La fille de Jahnu (Gangâ,), tremblante, le corps brûlant, blessée par la vigueur de son enfant, dit alors:
Seigneur, je ne peux plus porter ton enfant.
Je me demande si cela est bien. Ma bonne santé n'est plus. Je chancelle et mon éclat est détruit, ô seigneur sans défaut.
Je ne peux plus porter ton enfant, ô feu. Et, poussée par ma détresse et non par un caprice quelconque, je vais le déposer.
Mon coeur n'est pas touché, ô Vibhâvasu, et le lien entre nous, très ténu, n'est dû qu'à l'adversité.
Ce qui est ici méritoire ou non, ce qui est juste ou non, je pense que cela te revient !
Vahni (Agni) lui répondit :
Porte quand même, porte mon enfant ! Il a ma vigueur et procurera de grands mérites.
Tu peux porter la terre entière, tu peux le porter. Et rien ne te sera inaccessible, si tu portes ma semence.
Mais, malgré l'interdiction de Vahni et des dieux, elle déposa l'enfant sur le mont Meru.
Bien que dévastée par l'ardeur de Rudra (Agni ?), elle était capable de porter cet enfant, mais elle y renonça avec force.
Elle contempla cet enfant, lumineux comme Vaishvânara (Agni), qu'elle avait déposé dans sa détresse. Agni alors lui demanda :
Ô Gangâ,, la meilleure des rivières, tout enfant est source de bonheur.
De quelle couleur est-il ? Est-il beau ? Quel est son éclat ? Dis-moi tout cela.
Il est beau, et a le même éclat que toi, ô feu. Couleur de l'or, limpide, éclatant, il illumine la montagne.
Sa fraîche odeur est celle des étangs de lotus, il est semblable au jasmin , ô dieu ardent.
Par son éclat, comme sous l'effet des rayons du soleil, tout ce qui l'entoure, sur la terre ou sur les montagnes, de partout, semble transformé en or.
Il parcourt les montagnes, les rivières et les torrents, et fait briller de son éclat les trois mondes et tout ce qu'ils contiennent.
Telle est la beauté de ton fils, ô Hutâshana (Agni) ! Semblable au soleil et au feu il possède la splendeur d'une autre lune.
Sur ces mots, la déesse Gangâ, disparut.
Skanda sera investi commandant en chef des armées des dieux et défera le démon Târaka.
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